mardi 19 juin 2012

BAVARDAGES DE PAULINE (ET SI DIEU ... TOME II - VERSET II).






NAISSANCE D'UN TETRAGRAMME ENFIN NON INDICIBLE,
SAVANTE RESULTANTE D'UN JOYEUX METISSAGE PLURI-CULTUREL.



-  Dis, "BODY", tenta Pauline.

-  Alors ça non, répliqua Boudyahdiah, un brin autoritaire ! J'accepte que mon incarnation en toi me réduise de moitié, mais tu y vas un peu fort en me limitant à quatre lettres ! D'autant que tu supprimes mes origines chrétienne et musulmane.

-  Dis, "BADA", corrigea Pauline espiègle. Tu ne vas pas nous faire une crise subaigue d'ontologite chronique ! B comme boud, A comme dans ya, D comme di et A comme dans ah.

-  Ta bada, bada, bada. Et puis tu oublies mon i grec hébreu.

-  Flagrant délit de patriarcat, exulta Pauline ! Tu ne peux t'empêcher de revendiquer ton Y génétique.

-  Tu as raison. Ce gène me pèse un peu, d'autant que je n'ai aucun X.

-  Cela devient difficile, consentit Pauline, perplexe.

-  Ben ...

-  J'ai une idée ! Tout d'abord, nous supprimons l'origine hellénique pompeuse de ton Y qui devient i, plus humble. Nous arrivons à "BIDA", mais cela fait un peu "nénette" qui a mal au ventre. Je te propose une inversion des voyelles, ce qui fait "BADI". Qu'en penses-tu, s'inquiéta Pauline ?

-  Ta recherche n'est pas mauvaise, encore que "bad", en anglais ...

-  OK, convint Pauline. Et pourquoi pas "DABI" ?

-  Cela me sied à ravir, conclut néo-DABI. Tu as frôlé le complexe d'Oedipe mal digéré avec dadi, mais tu t'en sors avec les honneurs, comme "dab".

-  Je vous ferais remarquer, cher ami Dabi, que je ne vous ai affublé ni d'une apostrophe après le d, ni d'un h aspiré avant le a. Depuis l'histoire de la Tour de Babel (Genèse 11, 1-9), l'Académie française dicte ses lois. Nous ne sommes pas sur Internet.

-  Que me dis-tu, à propos de Babeloued ? ...


Pauline savourait cette situation cocasse. En entendant Dabi monosyllaber "ben ...", elle avait contenu un moment de déception. "Cela" manquait d'éducation. En fait, Dabi prononçait "Ben". Mais tout de même, "Fils de" ! Elle ne pouvait laisser passer une telle régression. Dabi ne payait rien pour attendre.

-  Es-tu certaine, remarqua mine de rien ex-Boudyahdiah, que ce n'est pas "Fille de" ?

-  Bah !


Bas les masques, intériorisa Pauline. Nous nous découvrons au fur et à mesure d'une naissance respective. Ah là là. Elle se trouvait emberlificotée dans une toile d'araignée franc-maçonne, entremêlée de soiries religieuses. Le secret et le mystère ? Bonnet blanc et chapeau de laine couleur cheval d'Henri IV le béarnais.

Ceci étant, Pauline ne perdait pas la face.

Elle avait réussi à donner à son ami un surnom tétragrammique facile à prononcer, bravo !



Depuis quelques jours, son être affectif bouillonnait à qui mieux mieux, comme la marmite de Papin. Elle venait de décider l'achat d'un appartement dans les environs de Dermate, non loin du golf royal. Une partie de l'argent acquis lors de la vente des murs de son laboratoire (valeur de sa clientèle massacrée par la concurrence effrénée entre les trois "gros") et un emprunt feraient l'affaire. La réversion de son défunt ex-mari Régis et quelques remplacements apporteraient des revenus suffisants, en attendant sa propre retraite. Pour la première fois de sa vie, elle ne jouerait pas les "Bernard l'Ermite". Elle avait trouvé la force de revenir à Dermate, ville d'adoption, alors qu'Eva (Cf Tome I, Editions B), mère génétique voleuse d'oxygène, y vivait encore. Mille kilomètres d'Espace et une année de Temps furent nécessaires pour arracher ce cordon ombilical générateur de mal-être. Un ami de Pauline évoquait son retour comme une marche arrière. Au contraire, elle le vivait telle une avancée, une re-naissance, une victoire de sa vitalité sur l'emprise. Bon débarras !

-  Que fais-tu du pardon, demanda Badi ? A force de rendre ta mère responsable de ton manque d'air, tu finis par la transformer en allergène capable de te déclencher une crise d'asthme !

Pauline mit quelques secondes à réagir à cette question cruelle à lui couper le souffle.

-  J'en étais sûre ! Avec ton Yahdiah, c'était inévitable ! Entre le "Grand Pardon", le "pardonnez-nous nos offenses", et le "Miséricordieux", les dés sont pipés préjetés, triple six à chaque fois !

-  Diable, se moqua Badi, faisant signe à l'auteure que les profondeurs de son inconscient lui commandaient d'écrire Badi au lieu de Dabi, dès que le Mal et son pardon pointaient leur nez. L'auteure se ressaisit vite.

-  Dis, Dabi, si la souffrance n'existait pas, nous n'aurions pas l'occasion, en la dépassant, de devenir sublimes.

-  Ou de progresser tranquillement; la douleur est-elle un moteur nécessaire pour avancer ? Le désir du mieux, ce n'est pas mal non plus comme carburant.

-  En effet, convint Pauline. Mais si nous désirons, c'est que nous avons un manque.

-  Ou tout simplement besoin, ce qui me semble assez logique pour un individu vivant, à part les boulimiques qui confondent faim et avidité.

-  Parce qu'avec "to-a", rien n'est nécessaire pour être ? !

-  A voir, conclut Dabi, clignant de son absence d'oeil.


Pauline n'insista pas, rassasiée. Elle se sentait survoltée. Ce n'était pas une mince affaire de re-commencer. En retournant à Dermate, elle écrivait une nouvelle histoire, avec les mêmes ingrédients mais transformés. Elle voulait construire une outre neuve avec le matériau relooké de l'ancienne, afin d'y entreposer une parcelle de bonheur tant espérée, coulant de source (entre autre Luc 5, 36-38, version pour alcoolique abstinent).

-  Tu vas bien vite en besogne, intervint Dabi. Tu passes allègrement sur la souffrance et tu nous parles déjà de bonheur. Pfutt.


Pauline n'écoutait plus sa musique intérieure, qu'elle surnommait "mon quatuor vocal". Quand Dabi la titillait, mettait un bémol à sa tranquillité d'esprit, elle lui fermait son coeur en considérant que le choeur dabien chantait faux. Mais si le Tétrathéosome devenait flatteur et donc apaisant, elle trouvait les harmoniques des quatre voix fort riches, mettant en valeur avec subtilité sa mélodie intime paulinégocentrique.

Depuis son installation à Strasbourg, elle goûtait les douceurs d'un quotidien sans réel souci financier majeur. Du haut de l'au-delà, Régis l'aimait-il encore ? Avec une efficacité d'homme de loi intègre, il se rappelait à sa mémoire, et de bien belle manière. Chapeau, le "Roi".
Quant à Joël, le non-mort, il n'avait pas perdu l'espoir d'éventuelles retrouvailles et téléphonait régulièrement à Pauline. Merveille de la technique, abolissant mille kilomètres d'espace, le temps d'un coup de fil.

La quiétude offerte par la présence du défunt se trouvait chamboulée par l'appel obsédant du vivant absent. Joël ne cessait de dire à Pauline que l'Alsace n'était pas un pays pour elle. Il avait raison, mais essayait de la convaincre que son amour pour elle rendait Dermate irrésistible. L'avenir confirmerait que la vie est tout de même plus agréable au soleil, surtout quand on aime le grand air. Avec une réserve : La grande ville a l'avantage de sembler diluer la sottise et la méchanceté, particularités nettement concentrées à Dermate.

-  Que penses-tu du climat de ton pays natal, proche de la baie du Mont-Saint-Michel, s'enquit Dabi ?

-  Mais cela n'a rien à voir, répliqua Pauline ! Les mouettes, l'air marin, le sable fin, les "doris" et les vignots, c'est tout à fait différent d'un climat continental plutôt froid !

-  Ah ? Bon. Parce que le varech, cela dépend de la température extérieure ? Tu crois vraiment qu'il n'y en a pas dans les Îles Britanniques ? Appeler des algues "goémon" n'enlève pas l'étymologie scandinave du mot "varech".

-  C'est vrai qu'en breton, c'est plus doux et moelleux, moins rugueux.

-  On dirait une pub pour ton enfance, taquina Dabi.


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